Caroline Laguerre : “Ce qui m’intéresse c’est la sensibilité et la singularité”
Caroline Laguerre est illustratrice et peintre. Pour elle, les inspirations se trouvent partout et la beauté n’est qu’une question de confiance en soi.
Ses dessins colorent également les rues de Paris, car elle accorde beaucoup d’importance à l’accessibilité de l’art.
Pourriez-vous vous présenter et nous expliquer votre parcours ?
Je suis Caroline Laguerre, j’ai 30 ans et je pratique les arts visuels : illustration, dessin, affiches, peintures, peintures murales… J’aime par-dessus tout diversifier les projets !
Après un baccalauréat Littéraire, j’ai étudié le cinéma à l’université, puis le design graphique à l’Ecole Supérieure d’Arts du Havre où j’ai obtenu mon diplôme en 2016. Aujourd’hui je suis revenue dans ma ville natale, Paris, où je vis et travaille.
Quelles sont vos sources d’inspirations ?
Je pense que tout peut être propice à devenir une source d’inspiration : regarder un film, écouter de la musique, des podcasts ou les discussions des gens dans la queue au supermarché. Mais également flâner, boire des verres, danser, aller au musée, faire ses courses au marché dans une ville étrangère, observer les immeubles, les toits et les balcons, et essayer de voir un peu à quoi ça ressemble chez les autres… Je m’aperçois que je suis une grosse voyeuse en fait !
Est-ce que vous essayez de véhiculer un message avec votre travail ?
Ce qui m’intéresse c’est la sensibilité et la singularité. Je ne pense pas transmettre de message clair dans ce que je crée, mais disons que j’essaye d’exprimer les idées dans lesquelles je crois. Je cherche plutôt à constituer un univers graphique dans lequel le spectateur aurait envie de plonger et qui peut lui apporter des émotions diverses. J’aime apporter du contraste, tant visuellement qu’au niveau de la thématique (mêler humour et drame, enfantin et sérieux…).
Les femmes, de toutes origines, sont très présentes dans vos œuvres. Leur corps est souvent disproportionné. Croyez-vous que représenter des femmes imparfaites pourrait contribuer à changer l’image et les stéréotypes sur le corps féminin auquel la télévision et les autres médias nous ont habitués ?
Bien sûr ! Le but de représenter des femmes “imparfaites” est justement est de faire disparaitre les clichés et l’idée même de perfection pour la soustraire à d’autres, plus universelles comme la singularité ou la personnalité de chacun(e) : tout le monde est beau à sa façon, la clé est la confiance en soi. J’aime représenter les corps des femmes et leurs courbes que je m’amuse à distendre, à en changer les proportions, le défi étant de garder un équilibre cohérent dans le corps et la composition du dessin.
En plus de votre travail d’illustratrice, vous utilisez les murs comme toile. Pourquoi c’est important que l’art se balade dans les rues aussi ?
Pour moi, le plus important avec l’art dans la rue c’est la notion d’accessibilité. Par définition, l’espace public est ouvert à tous : ainsi, les personnes issues de tous milieux sociaux et de toutes tranches d’âge s’y mêlent, ce qui n’est pas forcément le cas dans les galeries. Créer pour un public qui n’est pas ciblé m’intéresse particulièrement. Contrairement à une exposition classique, les gens ne sont pas venus pour voir une œuvre, elle s’impose à eux. Ils n’ont donc n’ont pas d’apriori sur ce qu’ils sont censés penser ou comprendre de l’œuvre. J’aime ce jugement direct, cette spontanéité.
Je ne sais pas si on peut dire que les artistes transforment la ville comme le feraient les urbanistes ou les architectes, mais ils l’embellissent et la font vivre. Ils y apportent des atmosphères différentes, des univers esthétiques dans lesquels les riverains peuvent se plonger et voyager un peu en restant près de chez eux. La plupart des œuvres de rue sont très bien accueillis par les habitants, et en plus elles valorisent le patrimoine et le tourisme. Tout le monde est content !
Je trouve également intéressant le fait que c’est un lieu de déplacement, de passage où de flânerie. En effet, en tant qu’artiste, j’aime l’idée d’accompagner les riverains dans leurs promenades et leurs déplacements. L’œuvre n’existe pas indépendamment du lieu géographique dans laquelle elle se trouve, elle doit l’épouser, s’y fondre ou au contraire en changer l’aspect. Dans tous les cas on peut dire que le support et le lieu impliquent des contraintes à prendre en considération : le mobilier urbain alentours, le point de vue… Dans mon cas, ces contraintes nourrissent énormément mes œuvres.
Y-a-t-il des collaborations que vous avez particulièrement appréciées ou que vous aimeriez bien faire ?
Je me considère comme chanceuse parce que j’apprécie la plupart des projets sur lesquelles je travaille. Ils sont très variés, ce qui me permet d’essayer de nouvelles choses et de me plonger dans des problématiques diverses, c’est cela que j’apprécie le plus.
Par exemple j’adore créer des peintures murales, mais j’aime aussi faire des illustrations pour des magazines et retranscrire des idées, des articles à travers le dessin, tout comme j’aime construire des affiches et intégrer de la typographie au travail de composition, j’aime aussi créer des gifs animés… Je considère chaque projet comme un petit défi et ce renouvellement perpétuel me permet d’explorer des tas de médiums et de supports différents.
Quant aux collaborations que j’aimerais faire, il y en a plein ! Par exemple, j’aimerais beaucoup faire des peintures murales dans des hôpitaux, c’est un projet que l’on m’a déjà proposé mais qui est malheureusement resté en suspens ! J’aimerais aussi faire des peintures dans un festival de musique par exemple, ou encore dans l’univers de la mode, travailler sur des affiches de films ou de théâtre, des couvertures de bouquins…
Plus d’informations sur la page Instagram de Caroline Laguerre.
Propos recueillis par Violagemma Migliorini
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